lundi 25 octobre 2021

Le Dragon de Tasdemanie

 

« Le Dragon de Tasdemanie »

Illustration bloodofdragons

Le vent souffle, gronde, et tambourine sur mes volets. Les jours raccourcissent , la nuit tombe un peu plus tôt chaque soir et l’obscurité amène avec elle son lot d’ombres, de mystères et de frissons.

A vaux de route glissent les ombres, les chuchotements, les grincements et le bombillement de la nuit.

Une fois n’est pas coutume, ce soir, à la lueur de la bougie, ma plume se veut rieuse et un brin délirante, alors que dehors l’obscurité s’obstine à tricoter des frayeurs…

Il se fait tard… Soufflons la bougie… voici ce que ma plume me raconte ce soir :

Il était une fois… Au Royaume de Tasdemanie… Un prince… Un prince beau comme le jour… Un prince avec la bouille tout sourire…

Bien que tout les bambins naissent la bouille en colère, en braillant et en chouinant, lui, il naît en riant ! Chose plus étrange encore, il a déjà trois dents et une jolie houppette de cheveux indisciplinée ! Oui ! Quel bébé étrange ! Toutefois, cette bouille lui donne un charme fou et un brin rigolo.

Ce petit bout de choux passe à peine la tête pour découvrir le monde, que sa mère, la Reine de Tasdemanie, éprouve pour lui une tendresse et un amour incommensurable. Le Roi, quant à lui, à cheval sur les protocole, l’étiquette et la rigueur, éprouve du dégoût et voit ce bambin comme une injure à sa gloire et sa prestance. Cet enfant, ne correspond pas au fils parfait qu’il a tant désiré...

Malgré le manque d’amour paternel, mais couvé de l’amour de sa mère, notre petit prince grandit fort et en bonne santé. Toutefois, au grand désarrois du Roi, notre bon prince est une plaie pour l’ordre établi à la cour. Joyeux, rieur, farceur et indiscipliné est le petit enfançon, mais également distrait, bordélique, maladroit, toujours mal tiffé, et mal sapé en permanence.

Pour le Roi de Tasdemanie, chaque chose à la cour doit tenir une place bien définie, sur les tables lors d’un banquet les couverts doivent avoir un alignement parfait, sur les meubles il n’y a pas une ombre de poussière, et dans les coins de mur il n’y a aucune place pour la moindre petite araignée... Sur les terres de son royaume, il en est de même, chaque champs, chaque maison et chaque jardin respectent un alignement parfait… Ainsi est le Royaume, soumis à un tas de manies du Roi…

Arrivé à l’adolescence, le Prince n’est toujours pas discipliné et il ne se passe pas une journée sans qu’il ne joue mille et un tours aux habitants du château et ses parents. Il rivalise d’humour et d’idées loufoques pour faire tourner en bourriques tout un chacun avec des blagues exquises et savamment orchestrées… Enfin presque… N’oublions pas que notre prince est certes le roi de l’humour mais c’est aussi le roi des gaffes… Là où il passe, il y a de la casse, il y a des catastrophes et des bourdes à l’étiquette… et le Roi de Tasdemanie tempête et le déteste chaque jour un peu plus. Mais cela ne décourage pas le prince dans ses bêtises et son sourire s’élargit d’autant plus à chaque colère de son père.

Un jour, un automne, le Prince fait la bourde de trop. On est à l’approche de la fête des Morts, une saison où chacun rend hommage à ses ancêtres, et une saison où on se joue des peurs des uns et des autres pour mieux apprivoiser les ombres de l’hiver qui approchent.

A la nuit tombé, le jeune prince décide de se balader, dans les couloirs et les courtines du château, affublé d’un drap blanc démesuré pour jouer au fantôme. Pour parfaire son costume, et faire un maximum de boucan effrayant, il se pare dessous de l’armure de son père.

Mais bien étourdi, malavisé, et ayant lui même peur du noir, notre distrait prince allume une torche sous son drap… et s’en va ainsi dans les couloirs sans se soucier qu’un drap ça brûle...

C’est ainsi, qu’apparaît un drôle d’oiseau en flamme courant en hurlant et en panique dans le château. Les tentures prennent feu, le trône prend feu, le château prend feu, mais fort heureusement chacun arrive à sortir à temps du château. La Reine pleure son fils qu’elle ne trouve pas, le Roi, bien que sévère, s’inquiète pour son fils unique, et les habitants regardent ébahis le château se faire dévorer par les flammes.

Tout à coup, sort des flammes une ombre rougeoyante, on dirait un dragon flamboyant et immense. L’ombre écarlate se précipite et se jette dans la rivière qui borde le château. C’est notre prince, affublé de son drap cramoisi, sain et sauf… Il n’a pas la moindre trace de brûlure, l’armure de son père l’a préservé des flammes et sa bourde du soir lui a enfin mis un peu de sagesse dans la tête. La Reine et Le Roi se précipitent sur lui, heureux de le savoir vivant. Pour la première fois depuis des années, le Roi exprime son amour pour son fils, il lui promet d’être moins rigide avec lui et le Prince présente ses excuses promettant de faire désormais plus d’efforts sur son rôle à tenir à la cour.

Dès le lendemain du drame, les habitants, le prince, le roi et la reine, en pleine solidarité et bienveillance, se mettent au travail pour reconstruire le château et tourner la page.

Depuis ce jour, les troubadours chantent dans les contrées voisines, l’histoire du «  Dragon de Tasdemanie », mais personne ne sait qu’il s’agit réellement d’une banale histoire de « Drap con » et d’un prince maladroit. Le Royaume de Tasdemanie prospère et nombreux sont les chevaliers qui viennent en quête du Dragon de Tasdemanie pour éprouver leur force, leur bravoure et défier l’animal jusqu’ici introuvable…


Hélégia (Dame Péronnelle la Renarde)

Texte écrit pour l'Association le Merelle et les Hirondelles


 

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