Mademoiselle Marie Anne Adélaïde Lenormand
Comme vous l'aurez sans doute remarqué,
dans mon précédent article sur l'histoire du tarot, j'ai omis
volontairement une figure féminine célèbre et importante du monde
de la cartomancie. Il me semblait en effet de justesse de faire un
résumé à part de cette égérie fabuleuse qui marqua grandement
l'histoire des érudits de la voyance : Mlle Lenormand Marie-Anne
Adélaïde.
Ainsi donc, je vais ici vous glisser
avec mon humble plume l'histoire de cette femme, cette Sibylle, qui
traversa 50 ans de l'histoire de France et dont les frasques furent
une influence certaine sur le déroulement historique de trois
régimes politiques.
C'est Alençon, contrée de Normandie
célèbre pour sa dentelle, qui voit naître le 27 mai 1772 la
frimousse de cette graine de Sibylle. Elle est la seconde fille d'un
drapier de renom à Versailles Jean-Louis Le Normand et d'Anne-Marie
Gilbert. A l'âge de sept ans, la petite Marie-Anne-Adélaïde devient orpheline de père et de mère, et se retrouve placée à
l'Abbaye Royale Bénédictine. C'est dans cette Abbaye, qu'elle
s’attire les foudres de la Mère Supérieure pour avoir usé de
prédictions auprès de ces camarades. Elle va jusqu'à prédire la
remplaçante de l’Abbesse du couvent décédée. La « pécheresse
» est donc bannie vers d'autres couvents, entre en pension chez les
Visitandines et part ensuite en apprentissage chez une couturière,
mais rien ne canalise son obsession pour la pratique de ses dons de
voyance qui s’accroît de jours en jours. Dès l'âge de ces 14 ans
les flashs médiumniques se font de plus en plus précis.
Dès lors, la demoiselle s'emballe dans
sa passion et passe son temps à étudier l'astrologie, la
physiognomonie, la kabbale, la science des nombres, la philosophie et
la littérature. Son jeu favori pour ses divinations est sans
conteste le « Etteilla ». La pratique de la magie et des arts
divinatoires lui occasionne quelques démêlés avec la justice
toutefois classés sans suite.
Quand elle s'installe à Paris à la
veille de la Révolution, notre sibylle devient la lectrice attitrée
du Comte d'Amerval de la Saussotte qui la prend sous sa protection.
Malheureusement, ce protecteur sera arrêté par les « sans-culottes
» et guillotiné. Commence dès lors pour notre damoiselle une lutte
pour la survie et pour échapper aux détours funestes de cette
sombre période de l'histoire. Elle prédira d'ailleurs à cette
époque la chute du pouvoir de l'église et la fin de la monarchie.
C'est à Londres, qu'elle trouve son
refuge pour quelques temps. La capitale anglaise lui offre d'ailleurs
le tremplin nécessaire à sa célébrité et à son enrichissement
avant de revenir à Paris.
De retour à Paris, alors que la
voyance est toujours interdite, notre gente sibylle décide d'ouvrir
une librairie, rue de Tournon. Cet endroit, elle prend grand soin
pour le choisir, de telle manière à accéder à des ruelles et
passages secrets bien utiles en cette période où la Révolution
Française fait rage dans la cité parisienne.
Nombreux sont les consultants à venir
chercher des réponses auprès de ses cartes, tels les
révolutionnaires, les prêtres et les notables. Mirabeau, Louis
XVIII, la Princesse de Lanballe, Danton, Fouché, Robespierre, Marat
et bien d'autres. On dit même que Mademoiselle Lenormand, tentera
tant bien que mal de conseiller la Reine pour que celle-ci puisse
s'échapper de sa prison avant son exécution.
Elle prédira même, lors de sa
rencontre avec Robespierre, St Just et Marat, l'ordre et la manière
dans laquelle ces trois hommes mourront. Et la donne annoncée
funeste se réalise au grand damne de ces messieurs...
Une fois cette période sombre passée,
c'est une très grande dame qui fait la renommée de notre Sibylle et
héroïne. En effet, bien avant de devenir Impératrice Joséphine de
Beauharnais consulte à de nombreuses reprises les oracles de
Mademoiselle Marie-Anne Adélaïde Lenormand, et à chaque fois les
prédictions se révèlent de la manière énoncée : la mort du
général Beauharnais lors de la révolution, le mariage de Joséphine
avec Napoléon Bonaparte, l’avènement de l'empire, l'exil de
l’empereur et bien d'autres...
Vous l'aurez donc comprit, dès lors
Mademoiselle Lenormand devient la confidente et la Sibylle officielle
de la famille Impériale qui fera son succès et sa renommée. A
maintes reprises Joséphine de Beauharnais protège notre sibylle et lui sauve la mise. Car pour la petite anecdote, bien que Napoléon
Bonaparte soit magnanime, la devineresse l'insupporte, il la fera emprisonner
plusieurs fois suite à ses prédictions, et à chaque fois elle sera
sauvée par sa fidèle amie Joséphine.
A la mort de Joséphine, Marie-Anne
Adélaïde aura eu déjà une vie bien remplie et rédigera de
multiples ouvrages pour laisser témoignages de son parcourt. Le
temps suivant son court, la devineresse laisse derrière elle
nombreux ouvrages inachevés et deux tarots : le grand Mademoiselle
Lenormand (54 cartes) et Le Petit Mademoiselle Lenormand (36 cartes).
La plus grande Sibylle du monde des
Arts Divinatoires décédera le 25 juin 1843, suite à une crise
cardiaque, après avoir une fois encore pris le temps de donner
quelques prédictions autour d'elle.
La seule prédiction qu'elle aura raté
c'est celle de sa mort, puisqu'elle pensait mourir après être
devenue plus que centenaire …
Hélégia

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